Le Ranquet en Vadrouille...Carnet de route.

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Laos 3, Boten ou le fantôme Chinois...

Laos 3,

 

Boten ou le fantôme Chinois…

 

Proverbe Lao :

 

"Quand on est tout seul, il faut faire attention à ses pensées; quand on est en groupe il faut faire attention à ses paroles"

 

Il faut être bien couvert sur le scooter, le ciel est d’un bleu vif mais le froid s’installe sur le Nord Laos.

Sur l’impeccable revêtement qui file vers la frontière Chinoise, l’aiguille du cadran de vitesse tremblote sur le « 80 »…un record.

Dès que la N13 s élève vers les hauteurs du Yunnan, la moyenne s’apaise, le vent devient moins pinçant.

 

Nous roulons vers la ville artificielle de Boten en se promettant au retour de s’attarder un instant dans les villages de bois et de roseaux qui bordent le ruban bleu.

 

Les lourds camions Chinois chargés de grumes peinent dans les pentes ; la province d’« au-delà des nuages » dévore les coupes illégales qui déboisent les forêts Lao.

 

L’ « empire du milieu » ne parvient pas à étancher sa soif de bois, les troncs de teck abattus frauduleusement au Laos circulent en toute impunité vers la Chine…

 

Calée dans l’ombre des montagnes du Yunnan se dessine en de trop vives couleurs Boten, une ville morte percée de courants d’air.

 

Les Chinois ont construit Boten au Laos avec la bénédiction du gouvernement Laotien…

Difficile de résister à l’appétit  féroce du « Grand frère » qui a voulu faire de cette ville frontière un paradis du jeu comme à Macao.

 

Lorsque la concession de trente années a été accordée aux promoteurs, les villageois de Boten ont été « invités » à se déplacer de 7km  plus loin afin de permettre à l’« ami » Chinois de faire jaillir de la terre rouge, casino, hôtels et clapiers pour les travailleurs.

 

Dans un des pays les plus pauvres de la planète, c’était certainement d’un complexe de jeux que les Laotiens avaient besoin!

 

Le « Laos Vegas » a rapidement pris de l’essor. (humour Lao)

 

Dopée par l’interdiction des jeux de hasard du côté Chinois et boostée par une totale liberté d’entreprise sans règle dans ce « no man’s land » Lao, Boten la nouvelle, n'a pas su maitriser la frénésie des Chinois.

 

Les effets secondaires n’ont pas tardé à se faire sentir.

 

Dettes de jeux réglées de manières violentes, prostituées au pied des bus, vente massive d’alcool à l’extérieur du casino ont fait exploser le paradis Chinois et ses salles de jeux…

 

Les investisseurs ont disparu, les filles perchées sur hauts talons ont remballé, les croupiers et serveurs sont partis voir ailleurs et les stands à alcool et hôtels sont maintenant à l’abandon.

 

C’est une étrange atmosphère qui se dégage de la ville fantôme de Boten. Les constructions apparaissent encore récentes, mais flotte sur cette ville frontière l’odeur de la désolation.

 

Les hautes herbes envahissent les parkings et gagnent les immeubles que pas même un tagueur ne daigne bomber de sa marque.

Seuls quelques rideaux métalliques baissés paraissent encore survivre en offrant l’espace à un graffiti.

 

Boten est mûre pour courtiser le réalisateur en quête de toile de fond pour un film trash. Chinois bien sûr!

 

Le retour dans la vallée qui mène à Luang Nam Tha sera l’occasion de mettre le scooter sur béquille au cœur des villages.

Dans nos sacs, des brosses à dents et des savonnettes achetés localement. Les enfants et les femmes des montagnes en sont demandeurs.

 

Nous avons commis une maladresse en souhaitant distribuer discrètement ces menus cadeaux aux enfants. Dans un village, les hommes adultes ont brutalisé violemment les gamins pour leur arracher des mains les savons : pleurs, cris, coups…

Nous n’avions jamais vécu cela en Afrique… La misère détruit les consciences…

 

Depuis, nous faisons le choix du hasard des routes pour alléger nos sacs à l’intention de petits groupes en marche  vers leur village.

 

Bientôt l’obscurité va envelopper Luang Nam Tha et une brume humide se déposera comme chaque soir sur le marché de nuit. La lune, faucille d’argent sur le dos, éclaircira les rizières alentours.

 

Les loueurs ont garé en épis vélos, scooters et motos...

 

De nouveaux touristes débarqueront demain.

 

Ils iront aux étals du marché, aimantés par l’effluve des cochons noirs de montagne qui rôtissent dans leur couenne…Ils pourront accompagner le travers chaud et croquant d’une salade de papaye verte pimentée ; une ou deux bières Beerlao feront glisser ce plat simple absolument succulent…

 

à s’en damner!

 

 



22/01/2013
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