Le Ranquet en Vadrouille...Carnet de route.

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Colombie 13, Buenaventura, côte Pacifique, la mémoire noire de la Colombie.

 

 

 

 

 

 

 

Colombie 13,

 

 

 

 

 

Buenaventura, côte Pacifique, la mémoire noire de la Colombie.

 

 

 

 

 

 

 " C’est quand ils ont viré la guérilla, alors là le boxon a commencé…"

 

 

 

 

« Confession » d’un jeune noir au journaliste Colombien José Antonio Gutiérrez, lors d’un trajet en bus de Cali à Buenaventura en 2014.

 

 

 

 

En Colombie un quart de la population descend des Noirs déportés d’Afrique. 

 

Il a fallu attendre 1993, et la reconnaissance constitutionnelle par le vote de la loi dite des "négritudes" pour qu’ils bénéficient des droits propres à leur communauté.

 

 

 

Noir sur la ville.

 

 

Meurtres, viols, barbaries en bandes organisées, cadavres démembrés flottant dans les mangroves, population terrorisée, misère sur pilotis.

 

 

Scénario polar ? Pas vraiment hélas !

 

 

Les rares visiteurs qui s’aventurent à Buenaventura ne trainent pas longtemps sur le port, secteur pourtant réputé actuellement le plus sûr de la ville.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Rapidement  ils embarquent sur des lanchas à destination des villages côtiers du Pacifique où les attendent des pêcheurs qui leur feront découvrir le ballet des baleines remontant l’océan :

 

De juillet à novembre seulement.

 

 

 

 

Passage obligé pour rallier les villages côtiers du sud, Buenaventura, écrasée de chaleur et d’humidité, préfère la marée haute qui cache un moment les fonds fangeux de la mangrove, là où les Noirs ont défriché un peu d’espace pour planter sur pilotis des baraques de tôles ondulées.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Buenaventura et sa réputation maléfique, une odeur de sang et de vase, un espace perdu, abandonné même du Bon Dieu sauf de certains curés qui croient encore à la possible rédemption !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

John Reina, curé du diocèse de Buenaventura, à l'origine de l'organisation d'une marche qui a rassemblé plus de 70 000 personnes contre la violence en février 2014. Il défend un développement social et humanitaire. (photo Véronique Gueymard pour RFI)

 

 

 

 

 

 

 

À l’image d’un ponton en béton effondré dans le port, jamais reconstruit, les baraques lacustres bouffées par les moisissures semblent être prêtes à tomber à l’eau.

 

 

 

En clair, ici c’est le bordel !

 

Et, souffrance et misère obligent, dans les bas-fonds  de la ville on en compte quelques-uns.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour mieux comprendre le passé récent de Buenaventura, ci-dessous un extrait de l’article de Marie Delcas, correspondante à Bogota pour le  quotidien « Le Monde » publié le 22 Avril 2014 intitulé :

 

 

 

 

«  Buenaventura, petit morceau d’état voyou en Colombie » :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« … Dans le port de Buenaventura, il y a des assassins qui découpent leurs victimes. Vivantes. Deux cadavres démembrés ont été trouvés le 14 avril (2014) dans le quartier de Viento Libre.

 

 

 

 

Il a fallu que l'organisation Human Rights Watch (HRW) dénonce cette pratique atroce pour que le gouvernement colombien s'inquiète du sort de cette ville que se disputent narcotrafiquants, contrebandiers, criminels et investisseurs.

 

 

 

« La violence ici n'est pourtant pas nouvelle », soupire le Père John Reina, directeur du service social de l'Eglise.

 

 

 Sur la côte Pacifique, Buenaventura aligne records et contrastes.

 

 

Avec 375 000 habitants, 187 homicides en 2013, des centaines de disparus et plus de 13 000 déplacés, la ville est devenue la plus violente de Colombie. Drogues et armes y circulent en grande liberté… »

 

 

 

 

 

Description sans concession d’une violence ordinaire qui a tout d’un procès-verbal !

 

 

Dans les  années 2010, la zone d’influence des Farcs  se rétrécie  dans la région, les paramilitaires d’extrême droite  reprennent le contrôle des bidonvilles et s’emparent du juteux trafic de drogue qui transite par le port, débouché stratégique pour l’expédition vers le continent nord-américain.

 

 

 

Parallèlement, on estime que 60% des exportations légales du pays  passent par Buenaventura, laissant supposer ainsi une cohabitation « bienveillante » des autorités à l’égard des trafiquants meurtriers.

 

 

 

Chacun devant y trouver son compte !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans les années 2014 /2015, suite aux dénonciations des horreurs de ces bandes mafieuses, le gouvernement reprend la main en  déployant massivement l’armée, mais ne revient pas sur la privatisation du port de commerce qui autorise les entreprises à ne signer que des emplois précaires :

 

 

 

dockers noirs et corvéables (pléonasme !)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Depuis mars 2014, le gouvernement a renforcé les effectifs militaires et policiers dans les zones sensibles de Buenaventura. Ici, à Puente Nayero, ils vérifient qui entre dans le quartier.

RFI / Veronique Gaymard

 

 

 

 

Aujourd’hui, Buenaventura respire un peu mieux.

 

Les investisseurs sont dans la place, le visage de la ville change.

 

 

 

Le calme semble être de retour, une faible activité touristique voit le jour, le petit commerce se développe, mais tout cela parait encore bien fragile, un peu comme les cabanes bancales qui font face aux immenses flèches des grues modernes soulevant les conteneurs dans un interminable jeu de légo multicolore !

 

 

En quittant Cali pour la côte Pacifique, une seule et unique route taraude la montagne à coup de tunnels, souvent à deux voies, franchissant les rios et les vallées profondes.

 

 

 130 km de route colonisées par des armées de poids lourds transbahutant des conteneurs.

 

 

Ambiance moite au terminal de Buenaventura, les taxis patientent pour nous déposer sur le quai d'embarquement.

 

 

 

Inutile de claquer 5000 pesos nous conseille une locale qui a tout d’une mama africaine,  dix minutes de marche suffisent pour découvrir le Pacifique !

 

 

 

Sacs légers sur le dos, on traverse le dédale de rues commerçantes qui mènent au port.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous négocions une petite réduction pour nos billets aller/retour qui vont nous faire découvrir ces pueblitos de pêcheurs éparpillés sur la côte pacifique de la Colombie.

 

 

 

Tout se passe dans la bonne humeur et s’accompagne de sourires.

 

 

 

Je me demande franchement comment ces populations soumises  à de telles cruautés, subissant des conditions de vie aussi misérables, peuvent trouver encore l’énergie et le temps de rire avec le Blanc de passage !

 

 

 

1h15 de traversée en lancha rapide, torpeur palpable dans le village endormi de Juanchaco, soleil blanc sur sable gris brûlant.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ici c’est l’Afrique :

 

Noire, cabanes en planches, tôles rouillées,  brise dans les cocotiers, déchets et bois flottés sur la grève, chiens roulés en boule dans les coins d’ombre,  barques en sommeil.

 

 

 

 

 

Et puis la chaleur, impitoyable.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous déclinons l’offre des motos qui peuvent assurer le transport vers les plages préservées de ladrilleros et La Barra.

 

 

 

Nous avons des réserves d’eau suffisantes pour arpenter tranquillement la piste qui mène à ces deux villages, et quand il n’y aura plus d’eau, les Africains du secteur ont toujours de la bière au frais qu’ils savent commercer à un prix raisonnable.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C’est marée descendante, mais quelques éperons rocheux battus par les vagues contrarient un passage par la plage, alors nous suivons piste et sentiers coiffant d’immenses étendues de sable gris dominées par des promontoires couverts de forêts tropicales, jungle épaisse luxuriante surplombant des criques isolées, paysages insolites de grande solitude.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans ces villages, on vit de la pêche et un peu des locations de cabañas  les fins de semaine et pendant la saison des baleines.

 

 

 

 

Après deux bonnes heures de marche, nous arrivons en bout de course à La Barra après avoir visité quelques « logements » pour le moins sommaires, à vrai dire on ne nous attend pas, beaucoup de pensions sont fermées, nous sommes bien hors saison !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sous certaines latitudes, les cabañas peuvent avoir du charme, mais ici j’avoue réfléchir à deux fois avant de signer le contrat pour 4 jours au bord de l’océan :

 

 

 

 

Les cabanes sont dans le village, sans vue sur la grande bleue…Banquette en bois, matelas en coco, moustiquaire.

 

 

 

Prix équivalent à l’hôtel à Cali incluant quand même les 3 repas quotidien et…sous la tôle, 35 à 40° à la louche ! On sue rien qu' à regarder la cabane !

 

 

 

 

On jette l’éponge !

 

 

 

Marie attend dans la sombra foulard sur la tête.

 

 

On se boit un soda dans une tienda, on remet nos sacs légers sur le dos et retour vers Ladrilleros.

 

 Au total 3H30 de « rando » sous le cagnard.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Allez, une fois n’est pas coutume :

 

il porte un joli nom « Palm réal », atmosphère bucolique, chambre tout en bois sur parquet, air conditionné (ah oui quand même !) piscine, nous allions presque l’oublier, escalier descendant à la plage.

 

Au centre même du village, hôtel quasiment désert !

 

 

On boit une bière, ça aide à réfléchir. Nous n’avons jamais payé aussi cher !

 

Deux repas inclus, ça nous décide et on remet les pieds sur terre avec un tout compris à 200 000 pesos, le luxe au prix voisin d’une chambre de début de gamme à Roissy Charles De Gaulle ! (65 Euros/nuit)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Nous n’allons pas regretter notre choix et surtout, nous apprécierons les ballades dans ces trois villages de pêcheurs qui comme toute la côte Pacifique, concentrent la mémoire Africaine de la Colombie :

 

 

 

 

Une certaine nonchalance, une excellente cuisine (poisson, lait de coco, soupes savoureuses…), une attention toute particulière à la poignée de visiteurs venus de l’étranger, une gentillesse discrète, un sens du commerce sans arnaque (les prix sont affichés), une capacité à une vie simple par la force des choses.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

On se plait à penser que mieux vaut que rien ne bouge, qu’il est inutile de tracer des routes, que c’est tant mieux que seules les lanchas mènent à ces villages, que  plus l’accès est difficile et plus la magie de cette côte sera préservée.

 

 

 

 

Réflexions  égoïstes ? Peut-être.

 

 

 Comment ces populations calmes et généreuses envisagent-elles leur avenir ? Quels sont leurs souhaits ? De quelle « révolution » pourraient-elles avoir besoin ?

 

 

Le potentiel est énorme. Les Tours opérateurs y réfléchissent !

 

 

Malgré une végétation exubérante, on y rencontre aucun jardin, aucune production légumière ou fruitière.

 

Toute la « came » est en provenance de Buenaventura et débarque donc des bateaux.

 

 

La raison en serait la forte acidité des sols conjuguée à la salinité.

 

En y ajoutant le coût du transport, on devine comment  ici on doit compter ses sous !

 

La majorité des familles vivent sous le seuil de pauvreté.

 

 

Le retour à Buenaventura sera ponctué d’une émotion courte mais renversante.   

 

 

 

Enfin presque :

 

Notre lancha lancée plein pot  s’est payée un tronc flottant en pleine mer!

 

 

 

 

Effet garanti,  gite à bâbord et à tribord, un gros 40° , une longue seconde de doute quand on voit la surface de la vague de très près.

 

Rééquilibrage de l’embarcation sans panique aucune,  moteur calé !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A bord, les « blacks » ne bronchent pas.

 

Question d’habitude sans doute !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Conseils aux voyageurs :

 

 

 

 

 

 

Les bus entre Cali et Buenaventura  sont fréquents ; 3 heures de route environ.

 

 

23 000 pesos. On peut quitter Cali avec un bus à moitié vide, souvent un transfert s’opère en montagne pour compléter un autre bus en attente, tout se passe très bien.

 

 

 

 

Si vous en avez la possibilité, laissez votre gros sac en garde dans un hôtel à Cali et partez avec juste le nécessaire pour la côte pacifique.

 

 

 

 

La situation est devenue « normale » à Buenaventura. On peut  cheminer du terminal de bus au « Muele Turistico » en évitant le coût d’un taxi et  profiter de l’occasion pour acheter fruits, jus frais…

 

 

 

 

Un supermarché se trouve sur la droite avant l’accès au quai d’embarquement, possibilité de faire quelques courses avant le départ.

 

 

 

 

ATM et plusieurs banques à proximité. Prévoir l’argent nécessaire pour votre séjour sur la côte, aucun service bancaire dans les villages.

 

 

 

 

Toutes les compagnies de Lanchas pratiquent quasiment le même prix pour rejoindre Juanchaco :

 

 

plus ou moins 55 000 pesos l’aller et retour valable 15 jours.

 

 

 

Ne pas se formaliser si on vous case dans une lancha autre que la compagnie avec laquelle vous avez acheté le titre de transport, ensuite les agences s’arrangent entre elles.

 

 

 

Etre présent à l’enregistrement une demi-heure avant le départ prévu.

 

 

 

 

Cabañas sommaires mais possibilité de camper, quelques pensions ouvertes hors saison et 2 hôtels à Ladrilleros.

 

 

 

 

Contrairement à ce qu’écrit le « lonely planet » :

 

 

« il n’y  pas de plages où lézarder à Ladrilleros » ???

 

 

 

 

On se demande vraiment s’ils y ont mis les pieds ! La plage est immense, à marée basse on peut facilement rejoindre La Barra.

 

 

 

 

Bons restaurants de poissons à Juanchaco, propres et bien tenus. Généralement, les prix sont plus élevés que dans les autres départements du Sud mais ça ne doit pas décourager les petits budgets, aucun risque d’être tenté par les casinos !

 

 

Accueil avec un grand sourire assuré !

 

 

 

 

 Foncez sur ces terres peu fréquentées, l’immensité vous attend !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



21/02/2017
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